Le cheveu: follicule, structures associées et croissance

Souvent considérée comme un vestige de la crinière animale, la chevelure continue de remplir à la fois un rôle social (symbole de jeunesse, santé, fertilité) et biologique (protection du haut du crâne contre le soleil, séquestration et excrétion de substances biochimiques non désirées). La chevelure constitue ainsi un trait caractéristique de chaque individu et plus généralement de l’espèce humaine. Chez l’adulte, le nombre de poils est estimé à 5 millions dont 1 million sur la tête où 120 000 à 150 000 cheveux seulement couvrent le cuir chevelu. Selon la région du scalp, leur densité varie de 200 à 300 cheveux/cm2. Une centaine de cheveux tombent naturellement chaque jour. La vitesse de pousse du cheveu est de l’ordre de 0,3 mm par jour, soit 12 cm par an. Elle est influencée par de nombreux facteurs tels que leur localisation, le sexe, l’âge et l’appartenance ethnique de l’individu et des facteurs environnementaux.

Follicule et structures associées

Le follicule pileux est une annexe de la peau, qui résulte d’interactions épithélio-mésenchymateuses programmées au troisième mois de la vie embryonnaire. Ces mini-organes ont la capacité de se renouveler de manière parfaitement autonome, cyclique et asynchrone, ce qui les rend uniques dans le corps humain. Ils se renouvellent plus de 8-10 fois au cours de la vie. La racine du cheveu, implantée sous l’épiderme (4 mm de profondeur), inclut les glandes sébacées et interagit avec les structures associées (épiderme, derme, muscle arrecteur, système vasculaire). L’analyse histologique de l’unité pilo-sébacée révèle une organisation en trois éléments : le compartiment épithélial, le compartiment mésenchymal et la glande sébacée.

Le compartiment épithélial

Il est constitué de la matrice, la tige pilaire, la gaine interne et la gaine épithéliale externe.

La matrice

Située à la base du follicule et entourant la papille dermique, la matrice contient des cellules hautement prolifératives et peu différenciées, qui sont à l’origine des différents types cellulaires constituant le follicule [Tests : FOLL-0003; FOLL-0004].

La tige pilaire

Elle correspond à la structure visible du cheveu, et est constituée de trois couches concentriques (la cuticule, le cortex et la moelle).

  • La cuticule, enveloppe externe de 3,5 à 4,5 µm, est composée de cellules maintenues par un ciment riche en céramides, qui assure un rôle de protection des couches inférieures.
  • Le cortex, couche intermédiaire représentant 75 % du diamètre, constitue le corps du cheveu. Cette région est principalement composée de kératine, responsable de la cohésion, la rigidité et la souplesse du cheveu. Elle contient les pigments de mélanine donnant sa couleur au cheveu [Tests : FOLL-0011; FOLL-0015]. Cette production est sous la dépendance de l’expression et de la régulation de gènes clés [Test : FOLL-0009].
  • La moelle, ou canal médullaire, est la partie centrale.

Sous le contrôle partiel des facteurs de transcription LEF-1/CTF, la tige pilaire exprime de façon très spécifique la transglutaminase 3, ainsi qu’une quinzaine de kératines. Le niveau d’expression de ces marqueurs peut être évalué par analyses transcriptomiques [Test : FOLL-0004] ou par analyses immunohistologiques  [Test : FOLL-0003].

Les gaines épithéliales interne et externe

Constituée de trois couches concentriques (appelées Henle, Huxley et cuticule), la gaine interne est kératinisée. La différenciation des cellules la constituant dépend partiellement du facteur de transcription GATA-3. Ces cellules expriment la trichohyaline, les transglutaminases 1 et 5 et la kératine hK6irs. Enfin, la gaine épithéliale externe constitue l’enveloppe extérieure de follicule et exprime une mosaïque de kératines.

Le compartiment mésenchymal

Il comprend la gaine conjonctive et la papille dermique:

  • La gaine conjonctive est une matrice extracellulaire principalement constituée de collagène de type I et III et de protéoglycanes.
  • La papille dermique, unité permanente à la base du follicule, est constituée de tissu conjonctif et de cellules mésenchymateuses appelées fibroblastes de la papille dermique. Ces cellules expriment spécifiquement la phosphatase alcaline, CD133, la protéine anti-apoptotique Bcl-2, la cyclo-oxygénase de type 1, PGE2 et CRABP1. Les fibroblastes de la papille dermique génèrent des signaux provoquant la prolifération, la migration et la différenciation des cellules de la matrice, essentielles à la croissance du follicule pileux [Test : DPF-0002].

En plus des cellules du bulbe folliculaire, les fibroblastes de la papille dermique joueraient également un rôle de réservoir de cellules souches multipotentes qui pourraient se différencier en autres lignages cellulaires: chondrocytes, ostéoblastes, adipocytes… La membrane basale assure la séparation entre les compartiments épithélial et dermique. Elle est riche en matrice extracellulaire notamment constituée de collagène IV, de laminine V, de fibronectine et d’héparane-sulfate [Test : FOLL-0003].

La glande sébacée

La glande sébacée est constituée de sébocytes, cellules épithéliales formant le sébum qui protège le cheveu contre la déshydratation et participe à l’écosystème microbien. Elles expriment des marqueurs spécifiques tels que K7 et EMA et produisent des lipides (triglycérides, cires, squalène, cholestérol) qu’elles libèrent en éclatant en fin de différentiation [Tests : SEBOAR-0004; SEBOAR-0007; SEBOAR-0019]. Une dérégulation de la production de sébum peut conduire à des cheveux soit secs, soit gras. Les glandes sudoripares apocrines débouchent au niveau de la partie supérieure des follicules pileux et sont responsables des odeurs corporelles lors de la sudation.

Le cheveu, signalisation cellulaire et croissance

Le cycle de croissance du cheveu se compose de 4 phases dont les transitions sont finement contrôlées par un ensemble complexe de facteurs solubles activateurs ou inhibiteurs (facteurs de croissance, morphogènes). Ces phases se produisent indépendamment pour chaque follicule, ce qui assure la permanence de la chevelure.

La phase anagène est la phase d’élongation du cheveu (par production de tige pilaire) qui dure en moyenne 3 ans selon les individus et les facteurs environnementaux. Elle concerne environ 85% des cheveux. La durée de cette phase, conditionnant la longueur du cheveu, est dépendante du maintien de la prolifération et de la différenciation des cellules matricielles [Test : FOLL-0001; FOLL-0002].

Cinétique de croissance du cheveu [Test : FOLL-0001]

La phase catagène, transition entre les phases anagène et télogène, est contrôlée par des facteurs de croissance ainsi que la prostaglandine D2. Cette phase de régression dure en moyenne 3 semaines durant laquelle la croissance du cheveu est interrompue. Elle conduit progressivement à un état de repos. Durant cette phase qui concerne 1 à 2% des cheveux, les cellules épithéliales à la base du follicule entrent en apoptose [Test: FOLL-0002] alors que les cellules de la papille dermique restent intactes et migrent près des cellules souches du bulbe pour entrer en quiescence .

La phase télogène, initialement décrite comme un état de repos qui peut durer 3 mois, a été redéfinie grâce à des études transcriptomiques. Elle concerne environ 15 % des cheveux.

La phase kénogène est une phase de latence, non systématiquement observée à chaque cycle. Elle interviendrait après la chute du cheveu et durerait 2 à 5 mois.

A l’issue d’un cycle, l’ensemble des compartiments du follicule pileux à l’exception de la papille dermique a été dégradé par un processus apoptotique. Le début d’un nouveau cycle, récemment qualifié de phase néogène, est marqué par la régénération du follicule à partir d’un réservoir de cellules souches pluripotentes qui prolifèrent et se différencient sous l’effet de diverses voies de signalisation (BMP signaling pathway, Wnt/β-catenin signaling pathway). D’autres facteurs de croissance bloqueraient l’initiation de cette phase.

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